dimanche 28 juin 2009

LES YEUX DE MA MÈRE



Sur une photo, je me regarde dans son ventre.
À ses côtés, mon père porte dans ses bras ma sœur, de deux ans mon aînée.
Elle prépare le pain.[1] Ses mains donnent à la pâte la forme voulue.
De temps à autre, elle ajoute une petite branche de bois dans le four fait de terre, en forme de bol renversé avec une ouverture devant pour allumer le feu et introduire le pain à faire cuire, puis une ouverture au milieu pour dégager la fumée.
Par moments, la flamme éclaire ses yeux.[2]
Autrefois, pendant un temps, elle ne savait plus regarder la lumière et son cœur voyait mal.[3]
Les feuilles se sont étiolées. Les branches se sont affaiblies. L’arbre était à l’agonie.
Mais il y avait encore la sève.
Louange à Allah.
Des saisons se sont consumées. Du temps a succédé au temps. Des récoltes à d’autres récoltes.
Et lorsque la sève demeure, les feuilles renaissent, les branches se revitalisent et l’arbre, irrigué, renforce ses racines et s’élève dans les cieux.
Je la regarde.
Les étoiles qui embellissent le ciel sont dans ses yeux[4]
Ai-je su voir le Paradis sous ses pieds ?

BOUAZZA

[1] Je devais avoir trois ans lorsque mes parents se sont séparés. Ayant décidé de divorcer, mon père a empêché ma mère de garder les enfants. Après une période chez ses parents, elle a épousé son cousin et a eu avec lui d’autres enfants. Adolescent, je suis allé chez eux pour la première fois.
Aujourd’hui, ma mère n’est plus de ce monde. Mon père non plus.
[2] Qui caressent toujours mon cœur.
[3] Jeune mère divorcée et privée de ses enfants.
[4] Texte daté de 1992.

mardi 16 juin 2009

RENCONTRE



C’est une personne qui n’hésite pas à dissimiler, à camoufler, à tricher, à déguiser, à pervertir, à travestir, à trahir pour paraître, attirer l’attention, se faire voir, être le centre d’intérêt.
Tout ce qui ne renforce pas son ego est sans intérêt.
Seules comptent ses pulsions, ses impulsions.
Une telle personne, comme d’autres, peut rencontrer la Guidance.[1]
S’abreuver à la Source.
Irriguer les graines pour que germent les fleurs de la Foi.
Retrouver ce qu’on a eu avant d’être.
Faire de son mieux pour adorer Allah, comme Allah le demande.[2]


BOUAZZA


[1] Alhidaaya en langue Arabe.
[2] L’Islam consiste à faire de son mieux pour adorer Allah, comme Allah le demande.

samedi 13 juin 2009

ÉCHANGE




Mohammad, Français d’origine d’Afrique du Nord, discute avec François, d’origine du Nord-pas-de-Calais.
Après un inter-minable[1] rappel de résolutions et de contre résolutions de la gauche sur « la problématique migratoire », François enchaîne :
─ Je vais parler avec franchise.
─ Ji bounsi qui ji bouvi parli oussi. Ji ti lisse alours afic franechise.
─ Non, tu n’as pas compris ce que je veux dire. Franchise, ce n’est pas une personne. C’est une expression. Cela signifie parler clairement.
─ Ji suis bite.
─ Non, tu n’es pas bête. C’est une incompréhension, c’est tout. Les subtilités de notre langue ne sont pas simples. Je vais éviter les confusions.
─ Li connes fusions ?
─ C’est cela. Je ne vais pas reprendre les trois points que j’ai déjà exposés. Mais il faut bien retenir les trois si tu veux comprendre. Pour simplifier, je dirai que la problématique migratoire n’est pas compliquée. Il suffit d’une approche objective. La nôtre. Tu vois ? Tu permets que je te tutoie ?
─ Toi tuer moi ?
─ Non, moi je ne suis pas toi. Moi c’est moi et toi t’es toi.
─ Ji dis toi tuer moi ?
─ Non, pas du tout. Moi pas vouloir tuer toi. Je veux dire que je ne veux pas te tuer. Tutoyer. Au lieu de vouvoyer. C’est plus sympa.
─ Sein bas ?
─ C’est cela. Et la langue, tu t’y fais ?
─ Ji ibousi oune frineçise, ça fa.[2]
─ Est-ce que tu penses que tu es assimilé ?
─ Nou, ji ni suis bas assis mili.
─ C’est franc. Et est-ce que tu es intégré ?
─ Nou, ji ni suis bas un tigri.
─ Super. Tu es inséré ?
─ Nou, ji ni suis bas un siri.
─ C’est clair. Es- tu syndiqué ?
─ Nou, ji ni suis bas saint diqui.
─ Tu es pour l’islam ?
─ Lisse lame ?
─ Oui.
─ ça tranche.
─ Ah ! Et la laïcité ?
─ Lalla citi,[3] ji couni.
─ C’est un acquis de gauche.
─ Di gouche ?
─ Oui de gauche. La gauche défend la laïcité qui renforce l’insertion, l’intégration et conduit à l’assimilation.
─ À quoua ?
─ À la conscience universelle.
─ La conne science universelle ?
─ C’est cela. Et prononcé à merveille. Super. Mais attention. La droite dit exactement pareil. Sauf que ce n’est pas la même chose. La droite c’est la droite. C’est le capitalisme. Et la gauche c’est la gauche. C’est le socialisme.[4] Toi comprendre ?
Ceux et celles qui connaissent l’humour de Mohammad et qui ont assisté à cet échange, ont dépassé le stade de l’hilarité.
─ L’île Ariti ?


BOUAZZA

[1] Interminable.
[2] J’ai épousé une française, ça va.
[3] Madame cité.
[4] Qu’est-ce que le capitalisme ? Avait-on demandé à un Anglais. C’est l’exploitation de l’homme par l’homme.
Et le socialisme ? C’est l’inverse.

vendredi 12 juin 2009

BAISOLUTION




Du sexe sans frontières. La baise pour tous et pour toutes. Le cul libéré.
« L’époux travailleur » s’épuise à la « tâche » : bouches affamées, vagins boulimiques et postérieures insatiables.
« L’honorable épouse » se roule des pelles sur le lieu de « travail », et fait du domicile con-jugal un lieu de passe, où elle joue aux « devinettes » avec le passant pour qu’il « donne sa langue à la chatte »,[1] et salive pour la « chatte à fouetter ».[2]
« La fille ouverte » se livre à des rapports incestueux,[3] fait bander le chien et se fait souvent besogner par un ami de la « famille ».
« Le fils prometteur » s’enorgueillit de sa queue de cheval, très appréciée par une enseignante « libérée », portée sur la peinture, la s-cul-pture[4] et d’autres œuvres dont elle aime être profondément pénétrée.
Des lesbiennes, des homosexuels, des bisexuels, des hétérosexuels, des suceuses, des travestis, des masturbateurs, des gigolos et autres entretiennent cette « évolution cul-turelle », et étendent l’éveil de la conne-science.[5] Parmi eux, certains font participer des animaux[6] aux ébats.
« Libération sexuelle » : ambiance d’enfer.[7]
De temps à autre cependant, des « révélations fracassantes » sont faites sur les « déboires conjugaux » de chefs d’état et de gouvernement qui s’adonnent chez eux, dans des palaces ou ailleurs à des orgies, sur les frasques de ministres putes, sur d’autres qui s’envoient en l’air dans des bureaux, des ascenseurs et des chiottes, sur des députés, des sénateurs et divers représentants « élus » qui copulent à qui mieux mieux dans des véhicules de « service » et des recoins de bâtiments « publics », qui se font des fellations, se lèchent et fricotent dans de multiples endroits d’institutions diverses, qui aménagent mille et une rencontres pour se livrer à des enculeries et autres explorations anatomiques, sur des membres racoleurs de partis politiques, toute tendance con-fondue, qui usent de leur corps pour recruter, sur ceux et celles qui font l’éloge de la « promotion canapé »,[8] et qui défendent les mœurs de la fornication et de l’adultère.
Pourquoi ces « révélations fracassantes » ?
Pour faire semblant[9], selon les circonstances et les moments, de tenir à des « valeurs » et de s’intéresser à la « famille ».
Certes la « famille » décomposée s’affiche,[10] mais parfois, le « beauf »[11] et sa femelle apprécient que l’on fasse semblant de dénoncer la décomposition et de disserter sur la « famille », « socle indestructible ».
« Révolution sexuelle » ou baisolution pour les pour-voyeurs[12] et les pour-voyeuses[13] de « révélations fracassantes », ne doit pas empêcher de penser aux « votants » et aux « votantes » pour qu’ils aient la conne-viction[14] que la baisologie obéit à des « principes » qui ne con-fondent pas vie privée et vie publique et con-fortent la « liberté » et les « droits de l’homme ».
Autrement dit, il s’agit de ne pas offrir au « terrorisme » et à la « barbarie » ce qui pourrait aider à niquer la « démocratie » et la « civilisation ».
Les croyants et les croyantes ont su, savent et sauront à quoi s’en tenir.


BOUAZZA



[1] « Donner sa langue au chat » est une expression utilisée pour exprimer son incapacité à trouver la réponse attendue.
Ici, il s’agit pour le « passant » de lécher le « minou » (le vagin) offert avec sa toison pubienne.
[2] « Avoir d’autres chats à fouetter » signifie avoir d’autres préoccupations.
Ici, il s’agit pour le « le passant » de s’occuper du « minou ».
[3] Lorsque des membres d’une même famille sont majeurs ou atteignent l’âge de la majorité sexuelle, ils peuvent baiser ensemble s’ils sont consentants. Ce n’est pas une infraction en droit pénal.
Une sœur peut tout faire avec son frère et vice-versa.
Une mère peut s’envoyer en l’air avec son fils ou sa fille.
Un père peut enculer sa fille ou son fils.
Un fils peut besogner sa mère ou son père.
Une fille peut forniquer avec son père ou avec sa mère.
[4] Dans un coin de la chambre à coucher, à côté d’un pénis en bois d’ébène et d’une sculpture représentant un mâle avec sa bite en érection, trône une copie du tableau de Gustave Courbet, « l’Origine du Monde ». Tableau peint en 1866, suite à la commande de Khalil Bey, un diplomate Turc. Ce tableau représente une femelle allongée nue sur le dos, les jambes écartées, offrant son vagin et sa toison pubienne. La voisine « libérée », portée sur l’art, aime se prendre pour la femelle du tableau. Parfois, entre deux parties de baise, elle met son doigt, le majeur, dans son vagin et se livre à un va et vient intense en murmurant que le tableau aurait été mieux avec une bite dans le vagin.
[5] La conscience.
[6] Zoophilie : les animaux participent à la baise.
[7] Connue aussi dans des pays dits « musulmans ».
[8] Comment utiliser son vagin et autres orifices et organes pour « réussir professionnellement ».
[9] Quitte à « sacrifier » parfois quelques « spécimens » pour la forme.
[10] C’est « tendance ».
[11] « Monsieur tout le monde », avec ses travers.
[12] Pourvoyeurs.
[13] Pourvoyeuses.
[14] Conviction.

samedi 6 juin 2009

LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE


Suite aux différentes interventions militaires un peu partout contre les « terroristes » et autres « ennemis » de la « liberté » et des « droits de l’homme », principalement en Palestine, en Iraq, en Afghanistan, en Tchétchénie et ailleurs, la « communauté internationale » est soulagée.
Cependant, les « activités proliférantes » de l’Iran, sa « menace atomique », restent une « préoccupation universelle » pour la « sécurité de la région ». Elles représentent un « danger imminent » qui ne doit pas rester impuni. Défier la « communauté internationale », doit se traduire par une « condamnation unanime » et une « large mobilisation » des pays de la « liberté » et des « droits de l’homme », avec à leur tête les U.S.A,[1] pour sanctionner toute « violations du droit international et de l’esprit de l’O.N.U. »[2]
Les « ennemis de la « liberté » et des « droits de l’homme » qui veulent s’emparer de la « bombe atomique » au Pakistan, sont également, pour la « communauté internationale », une « épée de Damoclès » dont il faut se débarrasser au plus vite, car la réalité des risques, nécessite une « légitime défense » sans faille et non des « petites mesures » comme les tortures, les prisons secrètes ou les camps tel celui de Guantanamo.
Les armées qui défendent la « liberté » et les « droits de l’homme », face à la « barbarie », au « terrorisme » et à la « guerre qu’ils imposent », doivent, avec le « Conseil de Sécurité de l’O.N.U. », prendre de sérieuses mesures « anti-terroristes » pour protéger la « communauté internationale », « fragile parce que démocratique », et sauvegarder la « civilisation » et la « paix ».



BOUAZZA



[1] United States of America, les États unis d’Amérique, (construits par des Européens sur l’extermination des Indiens, sur l’esclavage, sur le terrorisme, sur l’utilisation des bombes atomiques et sur d’innombrables autres massacres et destructions qui continuent). Aujourd’hui, première puissance atomique.
[2] Organisation des Nations Unies.

jeudi 4 juin 2009

LIBERATION



Les paroles de Mohammad ‘Abd Alwahhab[1] et ses mélodies me parviennent et une ancienne sensation s’empare de moi. Je suis dans ma période d’élève interne[2] à Fas[3], au Mghrib.[4] J’étais au lycée. Parfois, avec d’autres internes, je me débrouillais pour écouter un transistor[5] et travailler en même temps. Lorsque c’était Mohammad ‘Abd Alwahhab, je ne faisais qu’écouter…
Mouçaafiroune zaadohou lkhayaalou…[6]
C’était la fin des années soixante. Je ne pensais pas du tout qu’après le baccalauréat, j’allais quitter l’Afrique[7] pour continuer mes études dans un pays d’Europe,[8] la France.[9]
Est-ce que je savais ce que je voulais faire ? Par moments, il m’arrivait après l’agression impérialo-sioniste de juin 1967,[10] d’être préoccupé par la libération de Filistine,[11] et de m’imaginer parmi les libérateurs. Il m’était même arrivé de vivre un moment d’exaltation d’un de mes frères[12] qui écoutait mon « reportage » lui attribuant un grand rôle dans les combats libératoires.
Je ne savais rien sur l’impérialisme, sur le sionisme, sur les régimes dits « arabo-musulmans » ou autres, au service de l’impérialo-sionisme.
Des années se sont écoulées. Des saisons ont succédé aux saisons.
Les deux enfants que j’ai eus avec mon épouse sont adultes, et nous sommes installés tous les quatre en France. Et seul Allah sait pour combien de temps encore et où finira le parcours de chacun ici-bas.
Et Filistine ?
En France, il y a sûrement beaucoup plus à faire pour sa libération.



BOUAZZA


[1] Chanteur et compositeur d’Egypte (1907-1991) que j’écoute à intervalles irréguliers.
[2] J’ai connu l’internat dés l’école primaire. Un ami de mon père s’était arrangé pour que j’y sois sans payer (même si mon père avait les moyens de payer). Au collège, après la première année et une partie de la deuxième à l’internat, je suis resté en famille à Casablanca. Je suis retourné à la fin de l’année à Khemisset, pour des raisons de santé que j’ai déjà signalés dans d’autres textes. Je me suis installé chez une de mes sœurs (décédée en 1970). Pour le lycée, l’ami de mon père s’est arrangé pour que je sois boursier. Après le baccalauréat, j’étais inscrit à l’École Normale Supérieure (l’E.N.S.) à Rabat, avec un pré-salaire. Mais, toujours pour des raisons de santé, je ne pouvais pas rester dans cette ville et à l’époque, je ne pouvais poursuivre des études universitaires que dans cette ville. En venant en France pour étudier, je n’ai pas obtenu le transfert du pré-salaire. L’aide matérielle de mon père était symbolique. J’ai dû travailler un peu, lorsque je trouvais « un petit boulot » pour avoir un peu d’argent. J’ai eu le soutien matériel de quelques camarades et d’un de mes frères que j’ai cité ailleurs. Et après, suite à l’échec de ce qui a été appelé le « putsch » du 16 août 1972 (et le ratage de celui du 10 juillet 1971), le système en place au Maroc a décidé l’année suivante d’accorder une bourse, pratiquement à tous les étudiants. Une bonne bourse. J’en ai donc eu une.
[3] Fès.
[4] Le « r » roulé. Maroc.
[5] Il appartenait à ma sœur décédée en 1970, la première année de mon arrivée en France. On ne m’a pas informé de son décès « pour que mes études ne soient pas perturbées ». Après une période de « perturbations », j’ai cumulé des diplômes, pas dans le but de « faire carrière ». Et en France, un tel cumul n’écarte pas le « déclassement », surtout dans mon cas.
[6] Un voyageur dont la nourriture est l’imaginaire…
[7] Ifriqya (le « r » roulé).
[8] Eurobbaa (le « r » roulé).
[9] Franeça, Faraneça (le « r » roulé).
[10] J’avais dix sept ans.
[11] Palestine.
[12] Il est installé depuis des années, à Lkhmiçatte (Khemisset), hébergé, comme toujours, dans une maison de notre père, aujourd’hui décédé. Il a été chargé de faire marcher un café installé au rez-de-chaussée de cette maison. Il n’y est pas arrivé. Des membres de la famille l’aident plus ou moins à avoir le minimum. Âgé aujourd’hui de presque cinquante quatre ans (cinq ans et demi de moins que moi), il est marié et père de deux filles, dont une va bientôt passer son baccalauréat ine cha Allah. De temps à autre, j’ai de ses nouvelles par d’autres. Lorsque nous étions jeunes, nous étions, comme dirait l’autre, les meilleurs frères du monde.
J’ai connu cette maison, il y a de cela trente deux ans. Le rez-de-chaussée n’était pas encore transformé en café. Je l’ai occupé pendant plusieurs mois. Avant mon arrivée, des membres de la famille qui ne voulaient pas que j’y sois, l’ont entièrement vidé alors qu’elle était luxueusement meublée. Ils ne m’ont même pas laissé un matelas par terre pour dormir avec mon épouse et notre enfant. Les fils électriques pour mettre des ampoules ont été arrachés, et d’autres dégradations, entreprises. Je me suis beaucoup occupé des ouvriers qui y ont réalisé de longs travaux : Réparation des fils électriques sectionnés, réfection de la salle de bain, nouvelle installation d’eau pour remplacer l’installation défaillante, construction d’une cheminée, travaux de boiserie et de ferronnerie, peinture générale et autres. J’ai rendu à mon père une maison remise à neuf par mes soins, ceux de mon épouse et à nos frais. J’en garde, malgré tout, un bon souvenir : Je revenais au Maroc avec mon épouse justement et notre premier enfant, et l’année d’après, nous avons eu notre deuxième enfant.
Après cette maison, nous en avons loué une dans un autre quartier. Nous y avons passé plusieurs mois, avant de revenir en France où nous sommes encore.
Peu de temps après cette nouvelle installation en France, il y a vingt huit ans, mon père a subi une intervention chirurgicale à Paris. En retournant au Maroc, il m’a confié vingt deux mille francs de l’époque, en me demandant de les lui envoyer plus tard, lorsqu’il me le demanderait. Par la suite, il m’avait téléphoné afin que je remette deux mille francs à une de mes sœurs que j’aime et qui, après quelques années à Grenoble, finissait ses études dans une université parisienne. Elle est installée aujourd’hui à Casablanca (Ddar lbida) où elle est mariée et mère de deux enfants. Je lui ai remis les deux mille francs en précisant à mon père que je ne lui restituerai pas le reste. Je ne voulais pas m’approprier cet argent. Mon père était dans une phase où il continuait à dilapider un peu tout et j’avais décidé de garder la somme restante et d’attendre. Il a toujours aimé l’argent et il en a peu dépensé pour certains de ses enfants, dont je suis. Compte tenu de la pourriture du système en place au Maroc, il n’est pas très compliqué d’imaginer certaines pratiques de mon père, haut fonctionnaire d’une administration de « l’indépendance dans l’interdépendance », pour « arrondir ses fins de mois ».
Après quelques années, je lui ai restitué la somme que je gardais. Le dépôt (alamaana) est sacré. Cette somme, comme beaucoup d’autres, a sûrement été dépensée dans des futilités.
Au décès de mon père, il y a huit mois, j’ai signifié à la famille mon désistement concernant tout ce qui a trait à l’héritage.
Louange à Allah, Seigneur des Univers. Chaque créature a un rôle. Rien n’arrive par hasard.
Le temps imparti ici-bas par Allah à une de mes sœurs, à ma mère et à mon père est terminé. Seul Allah connaît la place de chacune et de chacun dans l’au-delà. Je l’invoque pour qu’Il leur pardonne et les couvre de Sa Miséricorde. Il est Celui qui ne pardonne pas qu’on Lui donne un associé, et pardonne le reste à qui Il veut. Il est Le Clément, Le Miséricordieux.
Ma place m’attend. J’invoque Allah pour qu’elle soit au Firdaws Ala’laa, au Paradis Suprême. Amine.